Iran ancien
Sassanides

L’État sassanide

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Le Roi et la cour

A l’origine, la royauté était héréditaire. Plus tard, les familles nobles et le clergé obtinrent beaucoup d’influence dans le choix et l’élection du roi : le royaume devint une monarchie élective : la désignation du roi fut soumise à un collège composé du grand pontife, du généralissime et du chef des secrétaires.

© Jean Savaton
Bishapour : investiture de Bahram Ier.

Suivant l’étiquette, le roi se tenait caché, inaccessible et invisible même aux plus hauts dignitaires de sa cour : entre le souverain et sa cour un rideau était suspendu qui le masquait des regards. Le trône était placé au fond de la grande salle d’audience : le roi magnifiquement vêtu, assis sur son trône, sa tiare suspendue au-dessus de sa tête pour en allèger le poids, était entouré des grands dignitaires lors de l’audience solennelle des ambassadeurs. Le roi se montrait en public à de rares occasions, telles que les fêtes des équinoxes. Quand on délibérait de graves affaires de l’État ou quand on jugeait un seigneur, l’assemblée était publique. Toute cette mise en scène était destinée à impressionner le public et nul ne peut élever la voix en présence du roi.

La scène d’investiture est l’un des thèmes les plus fréquemment représentés dans les bas-reliefs sassanides (Bishapur, Taq-e Bostan, Naq-e Radjab, Naq-e Rustam) et si les détails changent d’un exemple à l’autre, la composition de base en est toujours la même : le souverain recevant des mains du dieu Ahura-Mazda lui-même une couronne, symbole de la royauté. Les personnages sont représentés soit debout, soit à cheval, comme dans le relief de Shâpur Ier. Des personnages secondaires sont parfois ajoutés ; dans le cas d’Ardéshir il est accompagné de son fils, Shâpur Ier, et d’un page avec un éventail (debout derrière lui) alors que deux enfants se tiennent entre le roi et le dieu.

Tête d’un roi sassanide, probablement Sapôr II.

Le souverain était entouré d’une cour somptueuse, parfaitement organisée et réglée selon une étiquette minutieuse, dont l’organisation administrative fut élaborée, sinon sous Ardashir Ier du moins à partir de son successeur Shapur Ier.

Le trésor royal confondu avec le trésor public était abondamment garni. Chosroès II s’était emparé d’une partie du trésor byzantin que l’empereur avait fait charger sur des navires quand les Sassanides mirent le siège devant Constantinople. A la fin de l’empire, la prise et le pillage de Ctésiphon par les Arabes leur procura un butin énorme dont la description nous donne une haute idée du luxe qui régnait à la cour des Sassanides.

L’habillement du roi était imposant et d’une somptuosité éclatante. On peignait le portrait du roi le jour de sa mort : on représentait son habillement et sa couronne, l’expression de ses traits, sa coupe de barbe. L’image était déposée dans le trésor royal afin que l’aspect du défunt ne fût pas ignoré de la postérité.

Les musiciens étaient fort recherchés, ils figuraient dans les cérémonies et accompagnaient même le roi à la chasse, plaisir favori du souverain. La chasse se faisait dans de grands parcs enclos, appelés « paradis » où l’on entretenait des lions, des sangliers et des ours.

L’administration

Une administration héritée des temps antérieurs et composée de bureaux (dîvân) formait l’armature de l’état. Mais la centralisation des pouvoirs de l’état est beaucoup plus forte que sous les Achéménides ou les Arsacides. En conséquence, les velléités de révolte des gouverneurs de province sont beaucoup moins fréquentes d’autant que le système d’espionnage mis en place par les Achéménides fonctionne toujours très bien. L’administration sassanide, basée sur une solide bureaucratie, était d’une telle perfection que, après la conquête arabe, les califes de Bagdad édifièrent leurs chancelleries sur le modèle sassanide et firent appel à des Perses pour assumer des fonctions importantes.

L’empire était divisé en quatre parties égales nommés pâdhgos, auxquelles on avait donné les noms des quatre points cardinaux : awâkhtar (nord), khwarâsan
(est, l’actuel Khorasân), nîmrôz (sud) et khwarwârân (ouest). Chaque partie était gouvernée par un vice-roi. Il n’y avait plus de satrapes sauf en Arménie, en Azerbaïdjan et dans les contrées limitrophes de l’Inde. Les gouverneurs de province étaient appelés marzbân ; toutefois les gouverneurs de race royale étaient qualifiés de chah (roi).

Après les réformes de Kavadh et de son fils Chosroès Ier, l’empire fut quadrillé par de petites unités administratives territoriales appelées shahr, administrées chacune par un shahrab chargé des affaires civiles. Cette autorité était complétée par le clergé zoroastrien qui composait l’administration du « défenseur et juge des pauvres » et par une autorité fiscale, l’amargar, qui chapeaute plusieurs shahr. Vers la fin de l’empire sassanide, tous les pouvoirs civils et militaires furent concentrés entre les mains du généralissime, le spâhbedh.

Les Sassanides renouèrent avec la politique des déplacements de populations et d’installation sur leurs frontières de colonies militaires, habitées par des hommes venant parfois de très loin et considérés comme dangereux pour l’empire, notamment des chrétiens.

Des rapports sur la perception des impôts étaient lus à haute voix devant le roi ; celui-ci apposait ses différents sceaux sur les pièces qui lui étaient fournis. Les ordres royaux étaient rédigés par son secrétaire, enregistrés dans un journal mensuel déposé aux archives. Le service de poste était réservé aux communications de l’état. Il reposait sur une organisation du type de celle des Achéménides : dans les plaines des courriers è cheval bénéficiant de relais, dans les zones montagneuses des coureurs è pied. Cette organisation sera encore en usage jusqu’au XIXe siècle.

La justice

Les juges étaient considérés et respectés. Les grandes familles assuraient les charges de médiateur et d’arbitre, celles de juges proprement dites sont réservées au clergé. Le roi était le juge suprême. Les premiers rois sassanides tenaient des audiences publiques deux fois par an aux équinoxes de printemps et d’automne. La plupart des rois sassanides ont possédé, plus ou moins, un profond sentiment de la justice et ont tâché de remédier aux abus des gouverneurs de provinces.

On distinguait trois sortes de crimes : contre Dieu, contre le roi et contre son prochain. Les crimes des deux premiers types sont punis de la peine de mort, et ceux du troisième par le talion. Sous Chosroès Ier, les peines avaient été adoucies : on tente de convertir les hérétiques avant de les mettre è mort ; seuls quelques révoltés et déserteurs sont mis è mort è titre d’exemple ; les crimes contre le prochain sont châtiés par l’amende et la mutilation.

La détention préventive pouvait durer des mois et même des années. L’aveuglement était une peine très commune appliquée surtout aux princes révoltés. L’exécution la plus fréquente était la décollation par le sabre ; la trahison envers l’état ou la religion était punie par la crucifixion. L’ordalie était fréquemment employée en cas de doute pour juger de la culpabilité ou de l’innocence de l’accusé : l’épreuve avait lieu soit par le feu, soit au moyen des faisceaux sacrés servant au culte.

En cas de persécution religieuse, les tribunaux ordinaires étaient dessaisis au profit de commissions royales composées en grande partie de prêtres.

Les Finances

Les revenus de l’état sassanide reposaient principalement sur l’impôt foncier, la taxe personnelle et les capitations dues par les chrétiens et les juifs. L’impôt foncier était fixé pour le canton d’après la récolte et tenait compte de la fertilité des terres. Les enfants, les femmes et les vieillards étaient affranchis de l’impôt foncier. Aux impôts réguliers s’ajoutent les dons coutumiers (âyin) et les présents obligatoires aux deux fêtes du Nauroûz (équinoxe du printemps) et du Mihragân (équinoxe d’automne). Malgré les moyens de pression employés, il y avait toujours des arriérés considérables et dans les situations extrêmes, le roi prenait des mesures de clémence.

Par sa situation privilégiée entre les Empires romain et byzantin à l’ouest et celui de Chine à l’est, l’empire sassanide devint une puissance économique. La fabrication des étoffes était fort développée et fort renommée. La soie venait de l’Inde par voie de mer ou de Chine par voie de terre. Le commerce avec la Chine était bien développé. Les chinois recherchaient le fard persan, les tapis babyloniens, les pierres précieuses de Syrie, les coraux et les perles de Mer Rouge, les étoffes tissées en Égypte.


 




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  Dernière mise à jour : 3 juin 2015
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