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Étrusques |
Pour les Romains, les Étrusques avaient fondé les premières villes d’Italie. "Romulus avait fait venir de Tyrrhénie des hommes pour le guider et lui enseigner en détail les rites et les formules à observer, comme dans une cérémonie religieuse. Le fondateur, ayant mis à sa charrue un soc d’airain, y attèle un bœuf et une vache, puis les conduit en creusant sur la ligne circulaire qu’on a tracée, un sillon profond. Des hommes le suivent qui sont chargés de rejeter en dedans les mottes que la charrue soulève, et de n’en laisser aucune au dehors." [1]
Dès l’époque villanovienne, il existe déjà une certaine hiérarchie sociale : seules certaines sépultures contenaient des armes en bronze et de la vaisselle métallique. Les villes se développent sur des hauteurs faciles à défendre, de préférence à peu de distance de la mer ou d’un cours d’eau. Ce sont de modestes agglomérations d’habitations construites en pisé mais qui accueillaient artisans et marchands. Il existe une corrélation certaine entre les transformations sociales et le développement des cités. Vers la fin du VIIe, certaines agglomérations constituaient de véritables métropoles (Tarquinia, Caere, Véies, Vulci). Dans ces cités, la filiation à partir d’un ancêtre commun, consacré par l’apparition d’un gentilice, s’affirme. Le phénomène touche d’abord les cités côtières et ne gagne l’Étrurie intérieure que plus d’un siècle plus tard.
Ces habitants sans gentilice exerçaient des fonctions domestiques, de musiciens, de lutteurs. ils semblent toujours rattachés à une famille (clientèle ?) par un lien de sujétion (fides ?). Denys d’Halicarnasse [2] compare leur situation à celle des Pénestes en Thessalie. Certains d’entre eux (etera) semblent relever de la juridiction d’un magistrat spécial, le zileteraias (ou zileterais) ; d’autres (lautni) avaient un statut proche de celui des affranchis qui n’est pas s’en rappeler celui des liberti romains. Dans les campagnes, là où l’économie se limitait souvent à une économie de subsistance, la société semble moins hiérarchisée mais elle était toutefois dominée par de petits seigneurs. L’aristocratie n’apparaît qu’avec l’essor des cultures d’exportation (vin et huile d’olive).
Les Grecs furent particulièrement choqués par la liberté dont jouissait la femme étrusque. Chez les Étrusques, il semble bien que la femme bénéficiait d’une égalité de traitement avec les hommes. Les femmes étrusques portaient un prénom alors qu’il était d’usage dans les sociétés antiques de désigner une femme en référence à son père ou à son époux. Le nom d’un individu faisait parfois d’ailleurs référence au nom de sa mère. Sur les représentations, notamment les scènes de banquet, on peut aussi remarquer que la femme était placée sur le même plan que l’homme.
Les sources grecques désignent les mœurs étrusques par le terme de « truphè » qui recouvre la mollesse, la volupté et la débauche dont les Étrusques auraient fait preuve. "Les Tyrrhéniens élèvent tous les enfants qui viennent au monde, ne sachant de quel père est chacun d’eux. Ces enfants vivent de la même façon que leurs nourriciers, passant la plupart du temps en beuveries et ayant commerce avec toute les femmes indistinctement. Il n’y a point de honte pour les Tyrrhéniens à être vus eux-mêmes faisant en public un acte vénérien ni même le subissant, car cela aussi est une mode du pays. Et ils sont si loin de regarder la chose comme honteuse que, lorsque le maître de maison est à faire l’amour et qu’on le demande, ils disent : "il fait ceci ou cela", donnant impudemment son nom à la chose. Lorsqu’ils ont des réunions, soit de sociétés, soit de parenté, ils font comme ceci : d’abord quand ils ont fini de boire et sont disposés à dormir, les serviteurs font entrer auprès d’eux, les flambeaux encore allumés, tantôt des courtisanes, tantôt de fort beaux garçons, tantôt aussi leurs femmes ; lorsqu’ils ont pris leur plaisir avec eux ou avec elles, ce sont des jeunes gens en pleine force qu’ils font coucher avec ceux ou celles-là . (...) Ils ont certes beaucoup de commerce avec les femmes mais se plaisent toutefois beaucoup plus avec les garçons et avec les jeunes hommes. Ceux-ci sont dans leur pays tout à fait beaux à voir, parce qu’ils vivent dans la mollesse et ont le corps épilé" [3]
"Théopompe dit que chez les Tyrrhéniens les femmes sont en commun, qu’elles prennent grand soin de leurs corps et qu’elles s’exercent nues, souvent avec des hommes, quelquefois entre elles ; car il n’est pas honteux pour elles de se montrer nues. Elles se mettent à table non auprès des premiers venus des assistants, et même elles portent la santé de qui elles veulent. Elles sont du reste fort buveuses et fort belles à voir." [4]
Au-delà d’une certaine médisance évidente, les récits des mœurs prêtés aux Étrusques devaient traduire un mode de vie très libéral, totalement incompréhensible et inconvenant pour les Grecs.
La visite des hypogées de Tarquinia confirme cette impression de joie de vivre : sur ces fresques funéraires, les banqueteurs, les danseurs, les athlètes, prolongent pour l’éternité le mode de vie aristocratique des grandes familles titulaires de ces tombes.
Enrichis par le commerce international, l’élite étrusque s’était mise à vivre « à la grecque », se réunissant pour des banquets où l’on consommait beaucoup de vin produit localement. On a ainsi pu parler d’une « Étrurie du vin » autour de Vulci et de Caere. Il semble d’ailleurs que ce sont les Étrusques qui ont fait connaître le vin aux Gaulois. Le mot même serait, avant d’avoir été latinisé, d’origine étrusque.
[1] Plutarque, Vie de Romulus, 11, 1-3
[2] Denys d’Halicarnasse, IX, 5, 4
[3] Théopompe, Histoire, livre XLIII
[4] Athénée, Le Banquet des savants, XII, 517d
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Dernière mise à jour : 13 mars 2008 2005-2024 © Clio la Muse |